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Wall Street et la City s’affrontent sur l’avenir du Libor

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Bob Diamond ignorait tout du fonctionnement du Libor (London interbank offered rate) jusqu’à l’éclatement, le 27 juin 2012, du scandale de la manipulation de taux interbancaires par des traders, basés principalement à Londres, affaire qui devait lui coûter sa place à la tête de la Barclays.

C’est ce que l’ancien directeur général américain de la banque britannique a assuré dans un entretien au New York Times, publié le 2 mai, dans lequel il a aussi soutenu la campagne des Etats-Unis en vue d’abandonner cet outil qui sert d’étalon pour les 350 milliards de dollars (266,8 milliards d’euros) de produits financiers s’échangeant chaque jour.

Pourtant, en dépit de cette affaire dans laquelle sont impliqués d’autres établissements de renom, Londres, avec le soutien de la Commission européenne, entend tout faire pour préserver l’indice de référence qui détermine le taux auxquels les banques se prêtent entre elles.

Gary Gensler, président de la Commodity Futures Trading Commission (CFTC), le régulateur des marchés à terme américains, s’est fait le chantre de la suppression du Libor : il s’agit, dit-il, de “restaurer l’intégrité des marchés et de promouvoir la stabilité financière”.


Aux yeux de ce croisé de la lutte contre les spéculateurs de tout poil, un nouvel instrument fondé sur les transactions réelles doit remplacer le taux londonien. Washington estime que le mode de calcul du Libor est foncièrement biaisé. L’indice est élaboré d’après les soumissions quotidiennes des banques participantes qui estiment le taux auquel elles empruntent à leurs consœurs. Les institutions qui forment ce “club” sont donc à la fois juge et partie. De plus, vu les réticences des banques à se prêter entre elles depuis la crise financière, le Libor est devenu un instrument ne reflétant pas la vraie situation du marché.

Pour sa part, le gouvernement britannique entend maintenir le Libor, tout en réformant sa gestion. Tirant les enseignements du scandale, un rapport, présenté le 28 septembre 2012 par Martin Wheatley, chargé de la protection du consommateur à la Financial Services Authority, le régulateur britannique des marchés, propose de durcir le contrôle sur le taux.

Londres espère que la création d’un nouveau régulateur, l’augmentation du nombre de banques soumissionnaires ou la réduction draconienne du nombre d’indices publiés chaque jour permettront à la City de conserver l’un des joyaux de sa couronne.

Dans cette foire d’empoigne transatlantique, les Etats-Unis tiennent la corde. M. Gensler est unanimement respecté dans le monde des régulateurs. Loin d’être complaisant envers Wall Street, cet ancien de Goldman Sachs a mis au pas les opérateurs sans scrupule sur les matières premières.

Ce gendarme, direct et tranchant, a aussi été à l’origine des lourdes amendes qui ont frappé deux banques britanniques et une suisse impliquées dans le scandale du Libor. Barclays a par exemple été condamnée à payer 360 millions d’euros aux régulateurs américain et britannique.

Soucieux de ne pas ternir la réputation de la City, la tutelle britannique a longtemps traîné les pieds. Le gouvernement de Sa Majesté ne paraît pas en mesure de répondre à l’offensive du chef de la CFTC. Désormais tutelle des banques, la Banque d’Angleterre sera dirigée à partir du 1er juillet par le Canadien Mark Carney, ancien collègue de M. Gensler chez Goldman, réputé hostile au Libor.

Par ailleurs, la Banque des règlements internationaux, regroupant les grandes banques centrales, soutient le point de vue américain. Quant à l’appui de la Commission européenne, il est pénalisé par les soupçons de fraude pesant sur l’Euribor, l’équivalent pour la zone euro du Libor londonien.

L’entente anglo-américaine, selon les discours officiels, est traditionnelle et constante. En réalité, comme le montre la polémique sur le Libor, elle est exceptionnelle dans les affaires financières. La raison tient à la concurrence effrénée entre la City et Wall Street dans la course au leadership mondial.

Le Monde


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